
En 25 ans la consommation mondiale d’électricité a doublé avec une augmentation très significative de la part des énergies renouvelables (ENR) utilisées pour sa production. La poursuite de cette croissance au rythme moyen de 4 % par an révèle le dynamisme économique des pays émergents et place les usagers, les opérateurs et les décideurs face à de nouveaux défis.
Électricité dans le monde en 2024
Faits marquants
En 2024, la consommation mondiale mondiale en électricité a atteint 31.153 TWh soit 4,3 % de plus qu’en 2023 alors que son taux de croissance moyen était de + 2,6 % par an entre 2010 et 2023.
L’électricité a représenté 20 % de la consommation totale d’énergie consommée par les Terriens et on peut noter d’importantes disparités régionales. Ainsi en Chine, qui suit une politique d’électrification à marche forcée, la part de l’électricité dans la demande totale d’énergie (28 %) est plus élevée que celle États-Unis (22 %), de l’Union européenne (21 %) ou du continent africain (10%).
En termes de consommations, la Chine occupe la première place avec une demande brute d’électricité de près de 10.000 TWh.Viennent ensuite les États-Unis, l’Union Européenne, l’Inde, le Japon et la Russie. C’est en Chine, en Inde et aux États-Unis que l’augmentation de la demande est la plus forte (+7 %, +5,8 % et +2 % respectivement).
En termes de production, le mix mondial moyen se répartit comme suit : Charbon 10.704 TWh (34%), Gaz 6.777 TWh (22%), Nucléaire 2.840 TWh (9%), ENR 9.848 TWh (32%). En comparant ces chiffres aux données de l’année 2000 où la consommation totale d’électricité avait atteint 15.510 TWh, on note la part croissante des énergies décarbonées en valeur absolue (2.919 TWh en 2000) comme en valeur relative (19 % en 2000), le recul du charbon en valeur relative (39 % en 2000) et l’augmentation du gaz naturel en valeur relative (18 % en 2000). Derrière ces données moyennes on note de fortes disparités selon les pays : en Chine 65 % de l’électricité est produite à partir d’énergies fossiles, alors qu’en France près de 95 % de l’électricité est produite à partir d’énergies décarbonées.
L’électricité est (presque) partout
Les principaux usages sont résidentiels (chauffage, climatisation, …), industriels (notamment dans les secteurs de la métallurgie, de la chimie, de l’agro-alimentaire) et tertiaires (hôpitaux, écoles, commerces, bureaux.…).
Là encore, la segmentation de la consommation varie d’un pays à l’autre : l’industrie absorbe 60 % de la consommation électrique en Chine soit près de deux fois plus dans l’ensemble des pays des l’OCDE (32%).
En France la consommation résidentielle représente 39 %, la consommation tertiaire 33 %, la consommation industrielle 26 % et la mobilité 3 % (chiffres EDF pour 2023).
L’omniprésence de l’électricité peut être illustrée et quantifiée par quelques exemples :
- La consommation annuelle moyenne d’électricité domestique en France est de 2,4MWh par an et par personne,
- Il faut 13,5 MWh pour produire une tonne d’aluminium primaire,
- Le parc français de box internet et décodeurs TV consomme 10 GWh par jour,
- La SNCF (plus gros consommateur d’électricité en France) absorbe 7 Twh/an.
- Samsung a utilisé près de 30 000 GWh pour ses opérations mondiales en 2023.
Cependant, 685 millions de personnes n’ont toujours pas accès à l’électricité, dont 85% en Afrique subsaharienne.
Perspectives
La hausse continue
D’après les prévisions de l’Agence Internationale de l’Énergie la consommation mondiale devrait continuer de croître de près de 4 % jusqu’en 2027, soit 3 500 TWh en 3 ans. Cette demande supplémentaire proviendra principalement des économies émergentes, qui devraient représenter 85 % de cette croissance.
La consommation d’électricité en Chine et en Inde tirent cette croissance avec des progression respectives de 6 % et 6,3 % par an jusqu’en 2027. Leur demande en électricité est soutenue par leur développement économique et l’augmentation de leur consommation domestique due à l’expansion de leurs parcs de climatiseurs.
La consommation d’électricité des pays développés devrait représenter 15 % de la croissance de la demande mondiale sur la période 2025-2027 notamment en Australie, au Canada, dans Union européenne, au Japon, en Corée et aux États-Unis. Cette hausse est due au déploiement de centres de données, de climatiseurs, de pompes à chaleur et des véhicules électriques.
La croissance de la production d’électricité issue des énergies décarbonées devrait répondre à l’ensemble de la demande mondiale supplémentaire au cours des trois prochaines années grâce aux énergies renouvelables (solaire, l’éolien et l’hydroélectricité) qui couvriront 95 % de l’augmentation de la demande. L’expansion rapide du solaire photovoltaïque, de moins en moins coûteux, devrait représenter environ la moitié de la croissance de la demande mondiale d’électricité d’ici 2027, contre 40 % en 2024. On verra plus loin les effets de la part croissante de sources d’énergie intermittentes sur la volatilité des prix.
La production d’électricité nucléaire va poursuivre une croissance régulière alimentée par la reprise de la production en France, les redémarrages au Japon et la mise en service de nouveaux réacteurs en Chine, en Inde et en Corée notamment.
Électricité et climat (et vice versa)
Emissions de gaz à effets de serre
Les émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2) provenant de la production d’électricité augmentent de plus en plus lentement (1 % en 2024, 1,4 % en 2023) et devraient rester stables au cours des prochaines années. Cela ne doit pas occulter qu’en quantité totale elles s’élèvent à 13;800 millions de tonnes de CO2 par an et qu’elles sont les plus élevées de tous les secteurs.
L’intensité des émissions de GES dues à la production d’électricité baisse nettement, avec une réduction record de 3 % en 2024, contre 1 % en 2023. D’ici à 2027, l’intensité mondiale de ces émissions devrait diminuer en moyenne de 3,6 % par an, pour passer de 445 g de CO2 / kWh en 2024 à 400 g de CO2 / kWh en 2027. (France : 27 g de CO2 / kWh en 2024).
Bien qu’elle soient impactée par l’activité économique, le prix des matières première et les conditions météorologiques extrêmes (vagues de chaleur, sécheresse…), la capacité des énergies décarbonées à réduire le recours aux énergies fossiles est une tendance forte.
Résilience de la production et des réseaux
Comme on l’a vu au début de cet article, la décarbonation de la production de l’électricité repose sur l’augmentation de la production avec des énergies renouvelable et le déploiement de nouvelles centrales nucléaires. On ne (re)fera pas ici le débat du « pour ou contre » le nucléaire. En revanche il n’est pas inutile de rappeler que, avec les technologies actuellement utilisées, la construction de nouveaux réacteurs à grande échelle pourrait faire face à une raréfaction de l’Uranium d’ici à la fin du siècle, d’une part, et à l’accumulation des déchets, d’autre part. Il revient donc aux décideurs d’engager (et relancer) les travaux de recherche et de développement pour disposer de nouvelles générations de centrales nucléaires adaptées à ces enjeux.
Outre l’augmentation de la température à la surface du globe, le dérèglement climatique est responsable d’une augmentation de la fréquence et de l’intensité d’événements météorologiques extrêmes : vagues de chaleurs, sécheresses prolongées, tempêtes, précipitations intenses et brutales… Ces phénomènes sont à l’origine de nombreuses pannes sur les réseaux en 2024 qui ont provoqué des interruptions d’approvisionnement dans de nombreux pays (États-Unis, Caraïbes, Australie, Équateur, Colombie, Mexique, Brésil, Balkans,…).
De la ressource d’énergie primaire utilisée pour la production d’électricité à son acheminement jusqu’à son utilisateur final, tous les maillons de la fourniture d’électricité sont exposés à ces risques nouveaux aux effets délétères. C’est un défi que doivent relever les opérateurs afin de garantir la continuité de leur service par une adaptation des infrastructures existantes* dont le coût s ‘ajoute à celui du déploiement des capacités de production et de transport phasé avec la croissance de la demande .
* En France le maillage du réseau public de distribution est constitué de lignes d’une longueur cumulée de plus de 1,3 millions de kilomètres et de 700 000 postes de transformation.
ENR : les prix de l’intermittence
Partout dans le monde les prix de gros de l’électricité ont baissé d’environ 20 % (en moyenne) en 2024 par rapport à l’année précédente. Cette diminution suit la baisse des prix mondiaux des matières premières énergétiques. Dans ce contexte globalement favorable on note l’augmentation de la fréquence des effets du déséquilibres de l’offre par rapport à la demande que sont les prix négatifs et la sécheresse énergétique.
Prix négatifs
Alors qu’elles sont rares sur de nombreux marchés de l’électricité, on observe depuis quelques années augmentation des périodes (brèves) de prix de gros négatifs, notamment dans les régions australiennes de Victoria et d’Australie-Méridionale, au sud de la Californie et dans plusieurs pays d’Europe (Finlande, Suède, Pays-Bas, Allemagne). C’est le résultat d’un surproduction d’électricité non pilotable comme le solaire photovoltaïque qui ne peut être immédiatement compensé par un une baisse des ressources pilotables. Si c’est ponctuellement une « bonne affaire » pour l’acheteur, cela reste un centre de coût pour le vendeur et justifie que de telles anomalies soient lissées par une meilleure anticipation météorologique et l’amélioration des conditions de stockage.
Sécheresses énergétiques
Aussi appelées événements de Dunkelflaute, elles résultent d’une réduction la production d’électricité éolienne et solaire photovoltaïque lors de périodes d’ensoleillement et de vents faibles.
Elles ont entraîné une flambée des prix pendant plusieurs heures au cours de l’hiver 2024/2025 en Europe du Nord. Bien que ces pics de prix n’ont eu que peu d’impact très limité sur les prix moyens, ce sont des signaux importants pour inciter les opérateurs à compenser ces déficits par à un meilleur stockage (pour éviter le recours à des énergies fossiles) et encourager les usagers à assouplir leur consommation par de l’effacement ou des délestages volontaires.
Alors que l’utilisation de l’électricité ne cesse de croître dans le monde dans un contexte de transition énergétique, l’optimisation de sa production avec des ressources décarbonées complémentaires ainsi qu’une consommation responsable sont d’impérieuses nécessités.
Principales références
Electricity 2025 – Analysis and forecast to 2027- International Energy Agency (2025)
Prix de l’électricité négatifs – Commission de régulation de l’énergie (2024)
Éclairer l’avenir : l’électricité aux horizons 2035 et 2050 – Rapport du Sénat (2024)
Cet article a été republié sur le site Educavox le 23/4/25 https://www.educavox.fr/formation/analyse/la-consommation-d-electricite-augmente-ou-comment-a-quel-prix
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